Tous les métiers sont pénuriques, du stagiaire au top manager, en passant par les métiers opérationnels et supports ! Les métiers du tourisme et de l’hôtellerie sont parmi les secteurs professionnels les plus affectés.
Tout d’abord, il y a les facteurs économiques.
Les incertitudes suscitées par le climat social, la crise sanitaire, le conflit en Ukraine ainsi que les perspectives négatives de la conjoncture économique annoncées pour 2023 alimentent les principaux freins à la mobilité professionnelle.
Les salariés qui sont bien ou pas trop mal dans leur poste se rassurent en restant dans leur société. Seuls ceux qui veulent vraiment partir et /ou qui ont compris que le marché de l‘emploi leur est favorable pour gagner plus postulent.
Du côté de l’offre, tout d’abord, la reprise économique a dopé le nombre de recrutements.
Selon l’INSEE, il y a eu 93 000 emplois supplémentaires au second trimestre 2022. Fort de leur Prêt Garantie par l’Etat, les entreprises ont investi pour tenter de rattraper le manque à gagner du au COVID. Ensuite, le PGE a aussi contribué à diminuer le nombre de défaillances, libérant mécaniquement moins de candidats. Enfin, la vague de levées de fond des start-up a également accentué ce phénomène. Le premier levier de croissance pour ce type d’entreprises est de recruter en masse pour s’installer rapidement dans leur marché, « quoi qu’il en coûte ! ».
Ensuite, les facteurs sociétaux réduisent drastiquement le nombre de candidats disponibles.
La quête du bien-être et d’une vie meilleure dans un autre métier notamment à la campagne, amplifie le vivier de candidats indisponibles. Suite à la période COVID, de nombreux salariés ont pris le temps de réfléchir à leur avenir et au sens qu’ils souhaitaient donner à leur carrière professionnelle. Beaucoup se sont formés pour accroître leur niveau d’employabilité et de rémunération, ou pour changer de métier. D’autres se sont lancés dans l’entrepreneuriat ou l’auto-entrepreneuriat (641 500 en 2021) pour gagner en autonomie et mieux rééquilibrer le ratio vie personnelle / vie professionnelle.
En ajoutant ceux qui en ont profité pour voyager, bricoler ou ne rien faire, ce sont des centaines de milliers de compétences qui se sont exclues du marché de l’emploi pendant de très longs mois.
Cette tendance est véhiculée de manière positive par les médias, à tel point que cela donne l’impression d’assister à la promotion du changement de vie ! On parle tellement de Qualité de Vie au Travail que la valeur travail semble secondaire.
Cette évolution conjoncturelle du marché de l’emploi influence non seulement son équilibre historique, mais aussi les mentalités. Initiée par la mise en place du télétravail et le temps de réflexion donné par les confinements successifs, les salariés ont écouté, discuté et conclu que sans doute l’herbe est plus verte ailleurs.
Les mentalités ont évolué. Ce n’est pas qu’une question de génération. Mais plus globalement, un sujet sociétal. Le « ghosting » (les candidats qui disparaissent du processus de recrutement même avec un contrat de travail) se multiplie quel que soit le profil et la génération.
Enfin, les facteurs managériaux ont asséché également la réserve de candidats.
Comme il est plus hasardeux de recruter que de fidéliser ses collaborateurs, les entreprises se sont remises en question et se sont adaptées à cette nouvelle donne. Elles ont innové dans leur discours managérial et les dispositifs pour inciter leurs collaborateurs à rester le plus longtemps possible.
Elles ont agi sur les conditions de travail : réagencement des bureaux, flexibilité horaire, télétravail, formation, revalorisation salariale, discours managérial plus conciliant, voire « politiquement correct ».
Et elles ont raison, dans une certaine limite bien sûr. Les employeurs qui négligent les nouvelles exigences des collaborateurs et des candidats hypothèquent leurs chances de recruter rapidement. Certains de mes clients me disent qu’ils veulent attirer des candidats qui viennent pour le projet. Certes, mais la rémunération reste un facteur essentiel aux yeux des candidats, surtout dans un contexte où des sociétés « achètent » les candidats pour clôturer enfin leur recrutement !
Les candidats baignent dans une période où ils peuvent prendre le risque de se tromper car en « traversant la rue », ils retrouvent du travail rapidement.
Côté entreprise, la pénurie des candidats a contribué aux enchères salariales. Notamment l’afflux massif des capitaux dans les start-up qui ont recruté à n’importe quel niveau de rémunération. Cette tendance s’est récemment inversée. Dorénavant, elles ne recrutent plus, voire licencient.
Si la situation économique continue d’évoluer positivement, les candidats devraient se manifester avec pour objectif d’intégrer une nouvelle entreprise, comme pour tourner la page de cette période à oublier. Selon une étude de Microsoft qui a interrogé 30.000 salariés dans 31 pays, 41% d’entre eux envisagent de démissionner. Il faut donc aussi se préparer à cette vague de mobilité professionnelle.
L’accumulation de ces facteurs économiques, sociétaux et managériaux expliquent les difficultés actuelles pour trouver des candidats en passe de devenir des collaborateurs engagés, performants, résilients et agréables.